Ce soir
- Alinoë
- 3 févr. 2014
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Accoudé au comptoir, le dos rond, Le cœur en escapade, il prendrait bien la mort au bond. Depuis près de vingt ans, il traîne son désespoir Dans cette ville de malheur où il ne fait pas bon d’être noir. Chaque jour, il doit lutter, se battre, s’imposer… Chaque jour, s’étiole un peu plus sa foi en notre belle humanité… Il a tout abandonné là-bas, tout laissé derrière lui ; Il a tout risqué, même sa propre vie Pour rejoindre l’Amérique, ce beau, ce grand pays ; Cette terre de liberté dont on lui avait tant parlé…
Il rêvait d’une autre vie, d’un autre Lui ; Loin de ces guerres d’ethnie, de religion ; Loin de toute cette misère, mère de sa dépression.
Aujourd’hui, il traîne sa carcasse à moitié vide Derrière sa « belle » machine-outil ; Il accomplit sa tâche abrutissante Avec la conviction d’un automate… Et le soir venu, lorsque la cloche retenti, Il quitte son usine, ses collègues, son existence moisie Pour venir s’échouer ici, S’accouder au comptoir du même bar sordide, Noyer son chagrin et ses désillusions, Noyer son corps et toutes ses émotions…
Ce soir, il ne rentrera pas chez lui…
Ce soir, le fleuve sera son lit….
Alinoë, 2013
Défi Jetez l’Encre – Thème: Ecrire une histoire avec ces sept mots que vous soulignerez (quatrièmes mots de phrases piochées au hasard dans des nouvelles) : rond – s’imposer – noir -risqué – machine-outil – désespoir – Amérique – Contrainte : Récit à la troisième personne du singulier
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