Hypocondriaque

Bonsoir.

Je m’appelle Elisabeth mais tout le monde se plaît à m’appeler Lisette…

Depuis mon plus jeune âge, je passe ma vie entre hôpitaux et médecins. Dès que quelque chose passe par là, vous pouvez être sure que ça sera pour moi ! Ca peut aller de la simple punaise sur le sol qui vient s’enfoncer bien profondément dans la plante de mon pied à une bonne broncho pneumonie carabinée. J’ai tout tenté : les docteurs, les psychologues mais j’en suis toujours au même point !

Les gens autour de moi ne cessent de me répéter : c’est dans ta tête ! Et mes rougeurs, c’est dans ma tête peut-être ? Mes crises d’éternuement chaque fois qu’un chat passe près de moi, c’est dans ma tête aussi ? Non mais franchement !

Le terme scientifique pour nommer ce dont je suis sensé souffrir est HYPOCONDRIAQUE.

Est-ce que j’ai une tête d’hypocondriaque ? C’est tout de même pas ma faute si j’ai une santé fragile et un manque de pot relevant de la shkoumoun !

Prenez une journée type :

Tout d’abord, je me lève à la bourre vu qu’une fois de plus ma saloperie de réveil n’a pas sonné ! Lorsque que veux aller prendre ma douche, pas possible puisque la chaudière fait des siennes ! Je prends mon mal en patience, je rallume la chaudière, j’essaye d’ignorer le mal de tête qui monte déjà doucement et je me prépare en quatrième vitesse histoire de ne pas être trop en retard au boulot.

Jusque là, rien de bien extraordinaire !

Je sors, je vais à l’arrêt de bus en courant pour tenter d’attraper celui qui est bien entendu déjà là et qui démarrera avant même que je n’ai eu le temps de l’atteindre. Me voilà donc à l’arrêt de bus, en sueur, essoufflée et la journée ne faite que commencer.

Ca y est, rien que d’y repenser, j’ai des palpitations ! Il faut dire que courir n’est pas très bon pour moi, j’ai de l’arythmie cardiaque. C’est-à-dire que, contrairement aux gens ordinaire, mon cœur à moi n’arrive pas à se décider pour un rythme. Il préfère battre de façon aléatoire ! Si bien que, dernièrement, mon médecin (un nouveau) m’a demandé d’un air surpris si c’était normal qu’il ne l’entende plus du tout ! Évidemment, c’est une légère arythmie. Elle n’a selon les médecins rien de dérangeant et elle n’est pas suffisamment forte pour qu’on y prête attention. En attendant, j’ai le cœur qui bat de travers ! Et tout le monde s’en fiche !

Si encore c’était mon seul problème ! Mais ce n’est pas le cas ! Ca serait bien trop facile ! Non, j’ai aussi un œil qui dit merde à l’autre lorsque je suis fatiguée. Autant dire que ça ne fait pas très sérieux. Et puis surtout, il paraîtrait que c’est perturbant pour les gens en face de moi…

Oh, mais il n’y a pas que ça ! J’ai un système digestif plus que douteux ce qui fait que je suis obligée de prendre des compléments en plus de toutes les vitamines dont je me bourre pour tenter de ne pas chopper une fois de plus une grippe carabinée ou dieu sait quoi !

J’ai des allergies diverses : poiles d’animaux (surtout les chats), peintures, latex, laitages, poudres à lessiver, matières synthétiques, encens, et j’en passe.

J’ai aussi un foie bancale et une petite vessie.

Sans oublier tous les coups de malchance qui n’arrangent rien à mon état ! Récemment, j’ai voulu déplacer quelques meubles. La prochaine fois, je ferais mieux de rester assise ! En déplaçant une armoire, je me suis par la même occasion déplacée une côte ! Déjà que j’ai des maux de dos assez souvent, maintenant je ne peu plus porter aucun objets lourds jusqu’à la semaine des quatre jeudis !

Tous les matins, avant de me lever, je passe mon corps en revue, histoire d’être sure que tout va bien. Et bien, vous pouvez être sure qu’il y aura toujours un truc de travers : mal au ventre, mal de tête, les yeux qui piques… Alors, j’en parle, j’essaye de comprendre. Résultat : plus personne ne veut me parler ! Paraîtrait que le me plaint trop !

Mais je ne me plains pas, je partage ! Si on a même plus le droit de partager !

En plus de tout cela, parce que NON, ce n’est pas fini, vous pouvez être sure que je vais me chopper tout ce qui passe ! Par exemple, le mois dernier, ma colloque avait attrapé une grippe. Je l’ai eue aussi. Il m’arrive même d’être enrhumée en plein été !

D’ailleurs, en parlant d’elle, elle a déménagé la semaine dernière. Elle n’arrivait plus à me supporter surtout depuis que je me suis fait larguée…Le mois dernier… Mes copains ne viennent plus jamais chez moi et ne m’invitent plus jamais chez eux. J’ai perdu mon emploie aussi.

J’ai voulu aller voir mon psy hier mais j’ai appris que je ne pourrais plus jamais retourner le voir… Sa secrétaire m’a dit qu’il avait eu un malheureux accident. Mais je doute qu’elle m’ait dit la vérité ! S’il n’était pas là, pourquoi y avait-il des gens dans la salle d’attente. J’en suis donc venue à me demander si mon psy n’essayerait pas de me fuir, lui aussi.

Mais pourquoi ? Pourquoi tout le monde me fuit comme ça ? Pourquoi est-ce toujours ceux qui ont le plus besoin d’être écouter qui se retrouvent seuls ?

Non mais c’est vrai quoi ! D’accord, je ne suis pas parfaite mais j’ai quand même le droit d’être écoutée. Ou au moins que quelqu’un fasse semblant de m’écouter. Pourquoi n’a-t-on pas le droit de parler de ce qui ne va pas ? De toute façon, tout le monde s’en tape !

Personne ne fait vraiment attention à l’autre à moins d’y avoir un intérêt personnel… Même vous je suis sure que vous n’écoutez qu’à moitié les gens autour de vous. Et ça ne sert à rien de nier ! Lorsque vous demandez à quelqu’un si ça va, écoutez-vous vraiment sa réponse ou ne le faites vous que par politesse ?

Un jour, on m’a demandé si ça allait. En général, je réponds « oui » comme tout le monde, sans vraiment y penser mais cette fois j’ai dit non. La personne m’a sourit et ma répondu : « Cool ! Moi aussi ! ». Ensuite, elle s’est éloignée sans même avoir prit conscience de son erreur.

Enfin, voilà.

Si je suis ici aujourd’hui c’est parce que ça ne va vraiment pas…

Je sais que plus personne autour de moi n’y prête attention alors je me suis dit qu’en allant voir des inconnus je trouverais peut-être une solution ou au moins une oreille attentive ou l’autre.

Mais je vois déjà que je vous ennuie avec mes histoires. Après tout, qu’est-ce que vous pouvez en avoir à foutre de la vie d’une parfaite inconnue complètement malade ?

Je savais bien que c’était une idée stupide…Au moins j’aurai essayé.

J’aurais peut-être mieux fait de rester chez moi, devant la télé, sur le canapé, à attendre que mon proprio me foute dehors vu que ça fait des mois que je n’ai pas su payer mon loyer… Attendre dans le noir bien sur vu qu’ils m’ont déjà coupé l’électricité.

Je resterai là, assise, à fixer sans ciller la boîte d’anti-dépresseur que m’avait prescrit en dernier recours mon psy. J’aurai au préalable posé à côté la bouteille de whisky à côté. Je vais les regarder mais je n’y toucherai pas. Au cas où ça ferait mal… Je n’ai pas envie de souffrir…J’ai pas envie de mourir…J’aimerais juste faire partie de la vie de quelqu’un qui m’apprécierais comme je suis…J’aimerais juste pouvoir exister à ses yeux au moins…J’aimerais juste ne pas disparaître sans laisser de trace…J’aimerais juste avoir le droit d’exister sans culpabiliser…J’aimerais juste avoir le droit d’être moi… 

Alinoë 2009

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